Depuis l’estive 2009, et dans le cadre de son programme « aléas climatiques et pastoralisme » cofinancé par le Conseil régional et le Feader, le CERPAM a repris un suivi des « queyrellins », pelouses de l’étage subalpin bien connues dans les Alpes du Sud. Autrefois vouées à la production de foin tardif, ces pelouses sont devenues, avec l’abandon de la fauche, des pâturages précoces. Le queyrel ou fétuque paniculée est en effet bien souvent la première graminée qui pointe son nez au printemps à travers les névés. La haute valeur nutritive de la fétuque combinée à un fort recouvrement au sol font de ces pelouses des zones pastorales intéressantes… mais qu’on ne peut espérer valoriser par le pâturage que jusqu’à la mi-juillet. Consommée plus tard, la plante durcit et devient non appétente, elle est alors refusée par les animaux.
Voila bien longtemps que techniciens et éleveurs se penchent sur le cas des queyrellins qui, s’ils ne sont pas pâturés, ont tendance à être envahis par la fétuque paniculée au détriment des autres espèces. Leur richesse écologique tient en effet à leur très grande diversité floristique, façonnée par les anciennes pratiques de fauche tardive. Les premiers suivis réalisés par le CERPAM avaient permis d’initier des mesures agri-environnementales, voici 15 ans : gardiennage serré dans la plupart des cas, parcs de nuit ou de fin d’après-midi sur les queyrellins les plus dégradés. Aujourd’hui, avec un recul de 15 ans, il est possible de suivre précisément l’effet des mesures dans le but d’affiner celles-ci, par l’observation des différences d’évolution entre les queyrellins des fonds de vallon, très riches en espèces, des queyrellins des pentes sèches d’adret, beaucoup plus pauvres, et des queyrellins des replats de mi-versant, à 2300 m d’altitude, exposés aux rudes conditions alpines. Les queyrellins sont donc des pelouses à pâturer pour en entretenir la biodiversité… mais à pâturer rapidement en début d’estive, avant qu’elles ne deviennent trop désagréables au goût du bétail. Or le pâturage précoce n’est pas forcément favorable au riche cortège floristique de la fétuque. La quadrature du cercle sur les alpages qui en sont fortement pourvus… et cela se chiffre parfois en centaines d’hectares. Les queyrassins, autochtones ou transhumants, en savent quelque chose !
Pour en savoir plus : asilhol@cerpam.fr